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Claudiogène
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8 octobre 2007

Le quotidien est riche

Le quotidien est riche pourvu qu'on ouvre les yeux, les oreilles et parfois la bouche.
Aérogare de l'aéroport de Nice, dimanche matin, une heure d'attente.

Deux caddies débordant de bagages, deux grands-parents débordés, eux et deux petits-enfants, garçon et fille, dix et douze ans, espiègles.
- Tu l'as mis où le sac avec les casse-croûte ? questionne la grand-mère.
Moue dubitative du petit garçon.
- Tu l'as mis où le sac où y'avait le casse-croute ? (on est passé au singulier)
Le regard perdu de l'enfant croise le mien.
- Casse-croûte, ça veut dire sandwich, lui dis-je.
- Ah !.... Bah... je sais pas.
- Mais, c'est toi qui en avait la responsabilité... ajoute mamie.
...

Un groupe de retraités en voyage. Du brouhaha, des conversations inaudibles puis, tout près de moi, j'entends :
"C'est Jeannot Pinsec"
Quart de tour à droite. Il est là, soixante-quinze ans minimum, des yeux d'océan, un regard éclairé, un visage lumineux, une corpulence de bûcheron et un style raffiné très british, des gestes précieux, un gentleman.
C'est lui qui a dit cela.
- C'est qui Jeannot Pinsec ? demandé-je.
Et voilà notre fringant voyageur qui démarre. Dix minutes d'explication de texte du poème de Victor Hugo "Jeanne au pain sec".
Dès le début, je comprends que je n'avais rien compris, mais c'est trop tard. L'interrompre serait un péché.
Même pas honte. Je savoure.
Il ponctue son discours de "Autrefois, nous..."  magnifiques et si différents des c'était-mieux-avant habituels. J'ai droit au calcul mental, à la récitation, presque à l'encrier et à la plume sergent-major. Pour lui, je suis un jeune homme.
Dix minutes de bonheur. Il part pour Paris "puis le Nord" dit-il en me serrant la main pendant que ses compagnons  le tirent par la veste, comme par habitude, pour ne pas rater l'avion.
...

Un groupe de jeunes gens plutôt turbulents, du genre supporters qui n'ont pas dormi de la nuit.
- Hé, hé, les gars, j'ai vu Jackie Sardou. Ah, non. C'est Michel Sardou, mais j'ai cru que c'était Jackie Sardou.
Plus loin, je vois en effet Michel Sardou qui ressemble plus à sa mère qu'à lui-même.
Le jeune homme a raison.
Et, pour bien ancrer en lui le privilège qu'il vient d'avoir, il ajoute et conclus à l'adresse de la moitié de l'aérogare :
- Oh ! Hé ! Vraiment j'suis trop fort, hé, j'ai vu Michel Sardou. (trop fort. Le fruit des efforts et de l'entrainement sans doute)
...

Une grand-mère et sa petite fille sortent des toilettes.
- Non mais quand même c'est lui qui avait la responsabilité des sandwiches (notez le changement de mot)
La jeune fille, regard malicieux, répond à mon sourire par un rire étouffé, complice.

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Commentaires
C
Bravo ! Bien vu et bien raconté. <br /> C'est plus folklorique que Nice. <br /> Ah ! j'imagine la pagaille et les décibels...<br /> Merci à toi
M
Aérogare de l'aéroport de Tunis, dimanche matin, une heure d'attente.<br /> Un monde fou comme en plein mois d'août...<br /> Sept avions arrivant en l'espace d'une demi-heure, de Dubaï, Paris, Casablanca, Nice...Une vingtaine d'agents de voyages brandissent leurs pancartes. Des femmes, des hommes attendent et tendent le cou pour voir par dessus tout à chaque fois que les portes s'ouvrent pour laisser passer un caddie submergé de valises et de sacs plastiques pendant que les enfants sautillent en scandant les ritournelles des spots publicitaires de l'écran géant.<br /> Un homme passe la porte : deux petites filles se précipitent sur lui et le couvrent de leurs larmes de joie, "Baba est rentré pour l'Aïd!"<br /> Un affreux petit "nain" qui ne semble appartenir à personne passe par-dessus les barrières, tourne autour d'un poteau, se faufile vers les portes coulissantes et recommence tant et si bien qu'il finit par se retrouver coincé entre les portes. Aussitôt une demi-douzaine d'adultes se précipite pour sauver le polisson. Il n'était pas seul, donc. Les portes s'ouvrent et il file, tout son cortège aussi...<br /> Un extraordinaire caddie passe la porte mais ne peut prendre le tournant pour cause de surcharge!<br /> Un homme vient à la rescousse, des enfants aussi. Non! Ils n'en finissent plus de s'embrasser devant la porte : plus personne ne passe!...<br /> Tiens encore du 3ème âge... Ils sont nombreux...<br /> "Je vivais en Tunisie il y a cinquante ans, le cimetière de Bab El Khadra existe encore?"<br /> "Je viens chaque année passer l'hiver à Tunis"<br /> "J'ai 19 ans à l'envers"...<br /> Un dame très élégante arrive, maquillage impeccable sous des voiles vaporeux, très fière de ses achats, faire ses courses à Dubaï quand même! Ce n'est pas rien! Et les enfants qui l'étreignent le lui font savoir, prêts à faire craquer les emballages!<br /> Enfin, elle est là!...<br /> Le quotidien est riche pourvu qu'on ouvre son coeur.
M
car il fut bien sympathique ce brunch Claudiogène ! <br /> Et de même l'après midi ensoleillé qui a suivi d'ailleurs, bien calés dans le jardin à savourer ces quelques moments de quiétude.<br /> Oui bien dommage...
C
Oh que j'aime quand certains liens ne fonctionnent pas. ;-)
P
Hier, nous étions le 7. Et tout le monde, à table, t'attendait. Tu avais dit : " pour le 7, c'est ok (http://tranches2vie.hautetfort.com/archive/2007/09/21/allogene-xlviii.html)". <br /> Les oeufs brouillés refroidissaient, les viennoiseries rassisaient et toi, tu oubliais le brunch du 7...<br /> Maintenant, je sais pourquoi tu as loupé l'avion ! ;-)
Claudiogène
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