Dialogue anecdotique
Notre ami Didier, "Bleu comme une orange" a inventé La Semaine Mondiale de l'Anecdote qui bat son plein.
Ayant beaucoup aimé l'échange d'hier suite à sa première anecdote, "Allez, au revoir, bon week-end !" ,
je le recopie ici, sans autorisation, bien sûr, mais avec mes remerciements :
L'anecdote (Didier) : J'aime beaucoup observer les actes
de communication indirects. Vous savez, ce sont ces situations où une personne
exprime quelque chose pour en fait dire autre chose. Tordu mais parfaitement
intégré au système de nos douces relations humaines de ce 21ème siècle
naissant. Ceci est notamment très présent dans les univers professionnels, où
les jeux de rôle(s) battent leurs pleins.
Ainsi l'autre jour cette collègue. D'ordinaire, plutôt le style discret, je
viens faire mon taf, je suis dans mon bureau, bonjour bonsoir. Mais cet
après-midi là offrant une spectaculaire plongée dans l'exubérance. Et que je
déboule dans le couloir, et que je parle fort, et que je fais le tour des
bureaux [ce que je ne fais jamais] pour scander un joyeux, enjolivé et
tonitruant : allez au revoir, bon week-end !
J'ai entendu un z'avez vu comme je suis joyeuse de me tirer ! Et
noté un impérieux besoin de montrer cette joie-là. Pourquoi donc ?
Claudiogène : Com. indirecte,
cela s'appelle aussi une transaction dissimulée, qu'on peut juger d'hypocrite et
souvent nos ironies en sont.
Dans cette anecdote, j'ai plutôt l'impression que c'est le récepteur qu'il
faudrait analyser. Pourquoi l'a-t-il entendu comme ça ?
Didier : ton avis
m'intéresse, concernant le récepteur. Vu que c'est moi.
Qu'en dis-tu ? allez, négocions ! :-)
Claudiogène : Le récepteur
se préparait-il un week-end morose, d'obligations, de réunions
familiales ? Dans ce cas il aurait vu dans une joie naturelle de l'exubérance inhabituelle.
Se sachant loin de toute envie et de toute jalousie déplacées, il ne fit pas
l'effort de se remettre en question, certain que cette fonction était intégrée
dans son système. Alors, la modification incombait à l'émetteur ; il ne
pouvait y avoir de doute. Aussi, sa tension se relâcha, il n'était pas
responsable, il n'y pouvait rien.
Il échafauda un scénario : Cette sage et sobre employée n'était en fait
que coincée et timorée. Elle venait de rencontrer un quinquagénaire vieux-beau
qui lui avait fait miroiter un week-end type Relais et Châteaux très
romantique. Ses sens en perdaient leur boussole et elle voulait rendre jaloux
tout le bureau, l'immeuble, la rue et la terre entière.
Notre récepteur, l'âme vindicative, lui aurait bien raconter la suite de
l'histoire : Retour de Vieux-Beau chez Bobonne et larmes bureaucrates le
lundi matin.
Mais, beau joueur, il décida de déposer son amertume sur un blog célèbre et
coloré, à la réputation d'agora thérapeutique.
Didier : Mais c'est que c'est pas mal du
tout, cet exercice de lecture partagée. Intéressant, et même étonnant, de lire
ce que peut "déclencher" un écrit !
Voilà qui donne tout son sens à cette semaine mondiale de l'anecdote !
Aussi évoquons un autre scénario....
Le récepteur ne songea pas franchement à son week-end à lui qui n'était pas à l'ordre du jour à ce moment-là mais pensa plutôt que le Beaujolais nouveau avait
frappé. Il avait été fêté le midi. Et visiblement libérait de l'énergie.
Il eut du coup à la fois respect pour cette collègue si vivante qui sortait de
l'anesthésie ambiante et de la frustration de la sentir capable de cette
vibrance sans l'exprimer la plupart du temps.
Il déplora, du coup, que cette vivance soit l'exception et se prit à rêver
qu'elle devint la règle.
La sinistrose, peut-être, lui sauta alors au visage dans sa brûlante actualité
et il se prit le taquet ?
Ceci dit, pour revenir cruellement au monde comme il va, je me permets
d'ajouter que le fantasme du quinqua clinquant dans son château a du plomb dans
le beignet : la susdite vient juste de s'acoquiner avec un trenta qui
semble vigoureusement opérationnel :-) Bobonne peut dormir sur ses deux
oreilles avec cette collègue qui n'est ni sage ni sobre ni coincée ni timorée.
Epanouie ?
Claudiogène : Ne gâchons
pas le plaisir en voulant faire mieux. Je rends les armes.
Cet échange tient debout en l'état. Apprécions.
Didier : ;-)
- Autre chose : Très émouvante histoire vraie chez Tiphaine